BREVE PARA A
BEATIFICAÇÃO DE
SANTA TERESINHA DO
MENINO JESUS E DA SAGRADA FACE, O.C.D
Dado pelo Papa Pio XI
em 29 de abril de 1923
Le texte original
est en latin
Lu en latin à la Cérémonie de Béatification.
BREF DE BEATIFICATION
“QUOD JOHANNES VIDIT”
29 AVRIL 1923
PIE XI, SOUVERAIN PONTIFE
POUR PERPÉTUELLE MÉMOIRE
SAINT JEAN a vu, sur
les Montagnes de Sion, le chœur des Vierges qui suivent l'Agneau partout où il
va, et il a entendu un Cantique très suave que personne ne pouvait redire. Cela montre jusqu'à
quel point Dieu estime la fleur de la Virginité, c'est-à-dire, ce genre de vie
qui est plus conforme à la nature angélique qu'à la nature humaine. Cette vie,
précieuse entre toutes, due à la grâce évangélique, un grand nombre de jeunes
filles l'ont embrassée avec zèle, à la suite de l'Auguste Vierge, Mère de Dieu,
qui est regardée, à bon droit, comme l'Auteur de la Beauté virginale. Elles
portent leurs robes blanches dans l'Eglise de Dieu. Elles méprisent les
voluptés et les séductions passagères du monde, pour les Biens Célestes qui ne
passent pas. Aussi voyons-nous, dans l'Eglise Catholique, les lis
blancs des Vierges se mêler aux roses de pourpre des Martyrs. Les uns et les
autres forment cette couronne splendide dont l'Epouse immaculée du Christ est
ornée.
Or, à notre époque,
s'est distinguée, dans ce chœur des Vierges, THERESE DE L'ENFANT-JESUS,
Religieuse professe, gloire et ornement de l'Ordre du Carmel, qui, en peu
d'années, a rempli une longue course et a rehaussé la candeur virginale qu'elle
avait vouée à l'Agneau Divin, par l'éclat des plus belles vertus.
C'est à Alençon, au
diocèse de Séez, qu'est née la Servante de Dieu ; elle fut la dernière de neuf
enfants ; elle eut pour parents Louis-Joseph-Stanislas Martin et Marie- Zélie
Guérin, qui jouissaient des biens de la fortune et surtout des qualités d'une vie
vraiment chrétienne.
Elle naquit le 2
janvier 1873; elle fut baptisée le 4 de ce même mois et reçut les prénoms de
MARIE-FRANÇOISE- THERESE. A l'époque où la Servante de Dieu vint au monde, son
père, qui avait acquis honorablement une fortune suffisante pour quitter son
commerce de joaillier, s'était consacré tout entier à l'éducation de ses
enfants ; il avait pour compagne et pour aide, dans cette œuvre, sa femme qui
a, dit-on, exprimé le vœu que ses cinq filles consacrent à Dieu leur virginité,
comme elles le firent en effet, l'une après l'autre.
Dans
ce domicile de la piété, l'enfant avait à peine deux ans, qu'elle manifestait
déjà l'usage de la raison; elle fut aussitôt éprise de la beauté de la vertu.
Elle commença donc à aimer l'Enfant Jésus de tout son cœur pour ne jamais lui
déplaire. Elle avait quatre ans et demi lorsque la mort prématurée de sa
bien-aimée mère lui causa une cruelle douleur et lui fit perdre complètement sa
gaîté naturelle. Ses sœurs aînées, Marie et
Pauline, se chargèrent de son éducation; elle leur était soumise et leur
obéissait en tout, comme elle l'avait fait à sa mère.
Elle n'avait aucun
goût pour les jeux et les amusements de son âge, et se cachait dans la maison
pour se livrer à la contemplation des choses célestes. Son père, devenu veuf,
voulut, dans le but d'assurer davantage la garde et l'éducation de ses filles,
aller habiter Lisieux avec toute sa famille. C'est alors que la Vénérable Servante
de Dieu fut placée sous la discipline des Religieuses Bénédictines de la ville.
Douée d'une intelligence de beaucoup élevée au-dessus de son âge, elle fit de
rapides progrès, surtout dans les études historiques; quant au catéchisme, elle
l'apprit si bien, qu'on l'appelait le petit docteur. Favorisée d'une mémoire excellente, elle apprit par cœur tout le livre
de Y Imitation. Elle ne possédera pas moins bien, plus tard, la Sainte
Ecriture.
Lorsqu'elle
accomplissait tous ses devoirs de piété, elle y mettait tant de dévotion et de
modestie, qu'elle était un modèle pour les autres et un encouragement à l'imiter.
Cependant,
elle fut visitée par un mal dont le caractère demeura inconnu des médecins
eux-mêmes. L'avis des membres de la famille, qui ne manque pas de fondement,
est que ce mal fut causé par le démon qui prévoyait les défaites qu'elle lui
infligerait; on se confirma dans cette opinion, quand on vit la guérison
admirable dont elle fut favorisée instantanément, après des prières adressées à
la Très Sainte Vierge.
L'enfant,
qui brûlait du plus grand amour de Dieu, désirait depuis longtemps recevoir la
Sainte Communion; mais, d'après les règlements diocésains, elle en restait
encore éloignée à cause de son âge: elle avait à peine dix ans. Enfin, arriva
le jour tant désiré du 8 mai 1884, où il lui fut donné de voir ses vœux
comblés; aussi est-ce avec une joie incroyable, accompagnée des plus douces
larmes, qu'elle reçut, toute brûlante d'amour, le Pain des Anges. Peu après,
elle se prépara admirablement à recevoir la Confirmation et les dons du
Saint-Esprit.
Les
sœurs aînées de la Vénérable Servante de Dieu ayant dit adieu au monde, pour
entrer au Carmel, leur départ de la maison paternelle causa une profonde
douleur à l'enfant. Aussi son père crut bon de la retirer du Pensionnat des
Bénédictines, pour lui faire achever ses études à la maison. Mais, visitée
alors par des troubles de conscience, elle répandait souvent des larmes et ne
cessait de supplier Dieu de lui venir en aide... Dieu se laissa toucher par les
prières de son enfant. La nuit de Noël 1886, après avoir assisté à la Messe
solennelle, elle se sentit délivrée de toutes ses angoisses intimes; toutes ses
craintes disparurent et les mouvements de son âme furent animés de sentiments
tout nouveaux. Dès lors, elle semble courir à pas de géant dans la voie de la
sainteté; elle se porte avec plus de zèle aux œuvres de piété et de charité, et
dirige plus que jamais sa pensée vers le cloître du Carmel.
Son
père si pieux, qui avait déjà donné à Dieu trois de ses filles, ne refusa pas à
THERESE l'autorisation de suivre sa Vocation, malgré tout le chagrin que devait
lui causer la séparation. Quant aux Supérieurs ecclésiastiques, ils refusèrent
absolument de soumettre aux rigueurs de la vie religieuse une jeune fille, à
peine âgée de quinze ans. Ferme dans son désir, la Vénérable Servante de Dieu
résolut de recourir directement au Saint-Siège. Aussi s'adjoignit-elle, avec
son père, à ses compatriotes qui se rendaient en pèlerinage à Rome. Dès qu'elle
se trouva en présence de Notre Prédécesseur., le Souverain Pontife LEON XIII,
elle surmonta sa timidité naturelle et se jeta à ses pieds, pour lui manifester
le désir de son cœur. Mais le Pontife remit la suppliante au bon plaisir de ses
Supérieurs.
Frustrée
dans son espérance, l'héroïque Vierge supporta courageusement son chagrin et se
soumit à la volonté divine, jusqu'à ce que l'Evêque, touché enfin de tant de
vertu, accordât l'autorisation désirée.
Le
9 du mois d'avril 1888. la Servante de Dieu entrait au Monastère des Carmélites
de Lisieux. Elle était enfin parvenue au but qu'elle avait tant
désiré. Dès les premiers jours de sa vie religieuse, elle apparut tellement
élevée en sainteté, que sa Maîtresse avouait qu'elle n'avait jamais vu une
novice aussi fervente. Elle prononça ses Vœux le 8 septembre 1890, et fut
appelée providentiellement THERESE DE L'ENFANT-JESUS, comme pour signifier, par
ce nom, le genre particulier de sainteté qu'elle devait suivre avec ardeur, et
cette perfection qui est appelée l'enfance spirituelle, d'après cette parole de
la Sagesse incréée: Si vous ne vous convertissez et ne devenez semblables à de
petits enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux (Matt., XVIII,
3).
Et,
en fait, de même que l'enfant repose, tranquille, sur le sein de sa mère, de
même la Servante de Dieu se remit tout entière entre les bras de la Providence
divine. Simple comme la colombe qui pose son nid sur le bord de la cavité, elle
ne regardait que du côté du ciel, et elle conserva sans tache la robe blanche
du Baptême.
Trois
ans après sa Profession, il sembla bon à la Supérieure du Monastère (la Révérende
Mère Agnès de Jésus, sa sœur), pour mieux assurer le bien des Novices, de les
confier à THERESE, en lui donnant la charge d'aide de la Maîtresse. Ainsi donc
la Servante de Dieu avait vingt ans, lorsqu'elle reçut cette charge si
importante, qu'elle exerça jusqu'à sa mort, et qu'elle remplit avec une
prudence et une abnégation remarquables, non moins qu'avec les plus grands et
les plus beaux fruits spirituels. Elle se consacra tout entière au bien de ses
Novices; elle fut pour elles une mère et une sœur, d'une suavité angélique.
Pieuse,
douce, humble, obéissante, très fidèle à sa Règle, ce qu'elle enseignait par
les paroles, elle le confirmait par l'exemple. Toutes les vertus fleurirent en elle, mais elle excella dans l'Amour de
Dieu. Son âme, comme celle de saint François d'Assise, exhalait un cantique
d'Amour perpétuel. Elle a manifesté dans la poésie ses sentiments intimes, et
composé les plus belles strophes pour chanter les mystères de l'Amour divin.
Sur l'ordre de ses Supérieures, elle a écrit, pour l'édification et le salut
d'un grand nombre, l'Histoire de son Ame, afin de montrer la voie qui mène à la
plénitude de l'Amour. Notre Prédécesseur, d'heureuse mémoire, le Souverain
Pontife PIE X, n'a pas craint d'affirmer que, dans ce récit de sa Vie, répandu
aujourd'hui dans tout l'univers, les Vertus de la Vierge de Lisieux brillent
d'un si vif éclat que c'est son Ame, en quelque sorte, que l'on y respire.
Or, la fin de la
Servante de Dieu approchait, et le Seigneur lui-même sembla en donner le
présage en ce que les hommes pensèrent qu'une Vierge, d'une telle candeur, et
si angélique, ne pouvait rester longtemps sur la terre. Elle avait déjà dépassé
ses vingt-trois ans, lorsqu'elle fut atteinte d'une maladie de poitrine ; mais
elle n'omit rien des austérités de la Règle, jusqu'à ce qu'elle fût, à bout de
forces et obligée de garder le lit. Durant cinq mois, elle endura les plus
grandes souffrances, mais son visage était toujours gai et sa patience
admirable. Elle offrait ses souffrances au Christ, désirant mourir et être avec
Lui. Elle semblait consumée plutôt par l'Amour divin que par la maladie, et ce
lit, où reposait la Servante de Dieu, fut comme une chaire d'où elle prêchait
la sainteté à toute sa famille religieuse. Enfin, le 30 septembre 1897, après
avoir été favorisée d'une vision céleste, elle fit une mort très douce, et
s'envola aux Noces de l'Epoux Céleste. On lui fit les funérailles religieuses
et on l'inhuma au cimetière de Lisieux.
Bientôt le nom de la
Vierge sainte commença à retentir dans tout l'Univers catholique, et son
tombeau est devenu glorieux (Ps. XI, 10). La renommée de sa sainteté a grandi
de jour en jour; elle a été confirmée par des prodiges et des miracles. La
Cause de Béatification a commencé à être introduite près de la Sacrée
Congrégation des Rites. Des Procès ont été faits, selon l'usage, à Lisieux et à
Rome pour examiner ses Vertus. Lorsque toutes les preuves furent faites
juridiquement et bien pesées, Notre Prédécesseur, d'heureuse mémoire, le Pape
BENOIT XV, publia, le 19 des Calendes de Septembre 1921, un Décret solennel,
par lequel il déclarait que les Vertus de THERESE DE I.'ENFANT-JESUS étaient
arrivées à un degré héroïque.
On
se mit alors, sans retard, à examiner les Miracles que Dieu, disait-on, avait
opérés à son intercession, et, quand toutes les formalités juridiques furent
terminées, Nous avons Nous-même, le 3 des Ides de Février de la présente année
1923, publié un Décret où Nous reconnaissions la réalité de deux Miracles. Dès
lors que le jugement avait été porté sur l'Héroïcité des Vertus et sur la
certitude de deux Miracles, il restait à discuter si la Vénérable Servante de
Dieu pouvait être sûrement placée parmi les Bienheureux du Ciel. C'est ce qu'a
fait notre Vénérable Frère Antoine, Cardinal Vico, Evêque de Porto et
Sainte-Rufine, Rapporteur de la Cause, dans la Congrégation Générale qui s'est
tenue en Notre présence au Vatican, le 6 mars dernier. Or, tous les Cardinaux faisant partie de la Sacrée Congrégation des
Rites, et tous les Pères Consulteurs présents ont répondu affirmativement. Pour Nous, Nous avons
différé la manifestation de Notre avis, afin de pouvoir, dans une question si
importante, obtenir par des prières ferventes la Lumière céleste. Nous l'avons
demandée avec instances. Puis, le jour heureux où se célébrait, cette année, la
fête du Saint Patriarche Joseph, Illustre Epoux de la Très Sainte Vierge Marie
et Patron de l'Eglise, après avoir offert le Sacrifice Eucharistique, Nous
avons, en présence du même Evêque, le Cardinal Antoine Vico, Rapporteur de la
Cause et Préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, ainsi que de Nos chers
Fils Ange Ma- riani, Promoteur général de la Foi, et Alexandre Verde,
Secrétaire de la Sacrée Congrégation des Rites, décrété que l'on peut, en toute
sécurité, procéder à la Béatification solennelle de la Vénérable Servante de
Dieu, THERESE DE L'ENFANT-JESUS.
Voilà
pourquoi, mû par les prières de tout l'Ordre des Carmes Déchaussés, en vertu de
Notre Autorité Apostolique et des présentes Lettres, Nous permettons que la Vénérable
Servante de Dieu, THERESE DE L'ENFANT-JESUS, Religieuse professe de l'Ordre des
Carmélites Déchaussées, soit appelée BIENHEUREUSE, que son corps et ses
reliques soient présentés à la vénération publique des fidèles, pourvu
cependant qu'ils ne soient pas portés dans des suppliques solennelles.
De
plus, en vertu encore de Notre Autorité Apostolique, Nous autorisons, chaque
année, au jour voulu, la récitation de l'Office et la célébration de la Messe,
approuvés par Nous. Toutefois Nous ne concédons la célébration de cette Messe
et la récitation de cet Office que dans le diocèse de Bayeux et Lisieux, ainsi
que dans tous les temples et oratoires de l'Ordre des Carmes Déchaussés, à tous
les Réguliers et Séculiers qui sont tenus aux Heures canoniales et, pour ce qui
regarde la Messe, à tous les Prêtres qui iront dans les églises où se fera la
fête. Enfin, Nous accordons que les fêtes solennelles de la Béatification de la
Vénérable Servante de Dieu, THERESE DE L'ENFANT- JESUS, soient célébrées dans
le diocèse et les temples susdits, avec l'Office et la Messe, sous le rit
double majeur; et Nous ordonnons que cela se fasse les jours que l'Ordinaire
désignera dans l'année, lorsque ces fêtes solennelles auront été célébrées dans
la Basilique Patriarcale du Vatican.
Nonobstant
les Constitutions et Ordinations Apostoliques, ainsi que les Décrets publiés
sur le non-culte, et toutes les autres choses contraires. Mais Nous voulons que
les Copies des présentes Lettres, même imprimées, jouissent de la même autorité
que l'on accorderait, dans les discussions judiciaires, à la manifestation de
Notre volonté dans les présentes Lettres, pourvu qu'elles soient signées par le
Secrétaire de la Sacrée Congrégation des Rites et munies du Sceau du Préfet.
Donné
à Rome, près Saint-Pierre, sous l'Anneau du Pêcheur, le 29 avril de l'année
1923, de Notre Pontificat la seconde.
Par mandement special de sa Saintete.
P. CARDINAL GASPARRI, Secrétaire d'Etat.
BULA PARA A
CANONIZAÇÃO DE
SANTA TERESINHA DO
MENINO JESUS E DA SAGRADA FACE, O.C.D
Dada pelo Papa Pio XI
em 17 de maio de 1925
Le texte original
est en latin
BULLE DE CANONISATION
“VEHEMENTER EXSULTAMUS”
17 mai 1925
PIE EVÊQUE
SERVITEUR DES
SERVITEURS DE DIEU
POUR PERPÉTUELLE
MÉMOIRE
C'est
avec les sentiments d'une joie véhémente et de la plus vive allégresse qu'en ce
jour, et au cours de cette année de miséricorde, Nous, qui avons mis au nombre
des Vierges Bienheureuses la jeune Thérèse de l'Enfant-Jésus, Moniale de
l'Ordre des Carmélites Déchaussées, et l'avons proposée aux Fils très aimés de
l'Eglise, comme un très aimable modèle, Nous célébrons, au nom de
Notre-Seigneur Jésus-Christ, des Saints Apôtres Pierre et Paul et de Notre
propre autorité, sa solennelle Canonisation.
Cette
Vierge véritablement sage et prudente parcourut la voie du Seigneur dans la
simplicité et l'ingénuité de son âme, et, consommée en peu de temps, a fourni
une longue carrière. Encore dans la fleur de sa jeunesse, elle s'envola au
Ciel, appelée à recevoir la couronne que l'Epoux céleste lui avait préparée
pour l'éternité. Connue de peu de personnes pendant sa vie, aussitôt après sa
mort précieuse, elle étonna l'Univers chrétien du bruit de sa renommée et des
miracles innombrables obtenus de Dieu par son intercession. Comme elle l'avait prédit avant sa mort, elle semblait répandre sur la
terre une pluie de rosés. C'est à cause de ces merveilles que l'Eglise décida de
lui accorder les honneurs réservés aux Saints, sans attendre les délais
ordinaires et fixés.
Elle
naquit à Alençon, ville du diocèse de Séez, le deux janvier mil huit cent
soixante-treize, de parents honorables: Louis-Stanislas Martin, et Marie-Zélie
Guérin, remarquables par leur singulière et fervente piété. Le quatre du même
mois, elle reçut le Baptême avec les noms de Marie-Françoise-Thérèse. Agée de
quatre ans et sept mois, à sa douleur immense, sa mère lui fut ravie et la joie
s'éteignit dans son cœur. Son éducation fut alors confiée à ses deux sœurs
aînées Marie et Pauline, auxquelles elle s'efforça d'être parfaitement soumise,
et elle vécut sous la garde assidue et vigilante de son père très aimé. A leur
école, Thérèse s'élança comme un géant dans la voie de la perfection. Dès ses
plus jeunes années, elle faisait ses délices de parler souvent de Dieu, et
vivait dans la pensée constante de n'attrister l'Enfant Jésus en quoi que ce
soit.
Ayant
conçu, par une prévenance du divin Esprit, le désir de mener une vie toute
sainte, elle prit la ferme résolution de ne jamais refuser à Dieu rien de ce qu'il
paraîtrait lui demander, et y demeura fidèle jusqu'à la mort. Quand elle eut atteint sa neuvième année, on la confia pour son
instruction aux Religieuses du Monastère de l'Ordre de Saint-Benoît, à Lisieux.
Elle y passait la journée entière pour assister aux leçons, et le soir revenait
à la maison. Si elle cédait en âge à ses compagnes du pensionnat, elle les
dépassait toutes en progrès et en piété. Elle apprenait les Mystères de la
Religion avec tant de zèle et de pénétration, que l'aumônier de la Communauté
l'appelait « la théologienne » ou le « petit Docteur ». Dès ce temps-là, elle
apprit de mémoire et en entier le livre de l'Imitation de Jésus-Christ, et
l'Ecriture sainte lui devint si familière que, dans ses écrits, elle la cite
souvent avec autorité.
Une mystérieuse et
grave maladie la fit beaucoup souffrir. Elle en fut miraculeusement délivrée,
ainsi qu'elle-même l'a raconté, par le secours de la Bienheureuse Vierge Marie
qui lui apparut souriante, au cours d'une neuvaine où elle était invoquée sous
son titre de Notre-Dame des Victoires. Alors, pleine d'une angélique ferveur,
elle mit tous ses soins à se préparer au banquet sacré où le Christ se donne en
nourriture.
Dès qu'elle eut goûté
au Pain Eucharistique, elle éprouva une faim insatiable de cet aliment céleste.
Aussi, comme inspirée, elle priait Jésus, en qui elle trouvait ses délices, de
« changer pour elle en amertume toutes les consolations humaines». Dès lors,
toute brûlante d'amour pour le Christ et pour l'Eglise Catholique, elle n'eut bientôt
de plus grand désir que d'entrer dans l'Ordre des Carmélites Déchaussées, afin,
par son immolation et ses continuels sacrifices, «d'aider les prêtres, les
missionnaires, toute l'Eglise», et de gagner à Jésus-Christ des âmes sans
nombre, comme, près de mourir, elle promit de continuer à le faire auprès de
Dieu.
Au
cours de sa quinzième année, elle éprouva de grandes difficultés, de la part de
l'autorité ecclésiastique, pour embrasser la vie religieuse, à cause de sa
grande jeunesse. Elle les surmonta cependant avec une force d'âme incroyable,
et, malgré sa timidité naturelle, elle exposa son désir à Notre Prédécesseur
Léon XIII, d'heureuse mémoire, lequel, cependant, remit la chose à la décision
des Supérieurs. Frustrée dans son espoir, Thérèse en conçut une grande douleur,
mais elle acquiesça pleinement à la volonté divine.
Après
cette dure épreuve de sa patience et de sa vocation, le neuf avril de l'année
mil huit cent quatre-vingt-huit, elle entra enfin, avec l'approbation de son
Evêque et dans toute la joie de son âme, au Monastère du Carmel de Lisieux.
Là,
Dieu opéra d'admirables ascensions dans le cœur de Thérèse, qui, imitant la vie
cachée de la Vierge Marie à Nazareth, produisit, comme un jardin fertile, les
fleurs de toutes les vertus, surtout d'un amour brûlant pour Dieu, et d'une
éminente charité pour le prochain, car elle avait parfaitement compris ce
précepte du Seigneur: «Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés»
Dans son désir de plaire le plus possible à Jésus-Christ, et ayant lu et médité
cette invitation de la Sainte Ecriture: «Si quelqu'un est tout petit qu'il
vienne à moi», elle résolut de devenir petite selon l'esprit, et, en
conséquence, avec la plus filiale et la plus entière confiance, elle se livra
pour toujours à Dieu comme au Père le plus aimé. Cette voie de l'enfance
spirituelle, selon la doctrine de l'Evangile, elle l'enseigna aux autres,
spécialement aux novices, dont ses Supérieures lui avaient confié la formation
aux vertus religieuses; et ensuite, par ses écrits pleins de zèle apostolique,
elle enseigna, avec un saint enthousiasme, à un monde enflé d'orgueil, n'aimant
que la vanité et recherchant le mensonge, la voie de la simplicité évangélique.
Son divin Epoux Jésus l'enflamma encore du désir de la souffrance du corps et
de l'âme. Considérant, de plus, avec une profonde douleur, combien l'amour de
Dieu est méconnu et rejeté, — deux ans avant sa précieuse mort, — elle s'offrit
spontanément en victime à son «Amour miséricordieux». Elle fut alors, selon qu'il est rapporté, blessée d'un trait de feu
céleste. Enfin, consumée d'amour, ravie en extase, et répétant avec une ferveur
extrême: « MON DIEU, JE VOUS AIME », elle s'envola joyeuse vers son Epoux, le
trente septembre de l'an mil huit cent quatre-vingt-dix-sept, à l'âge de
vingt-quatre ans, méritant ainsi l'éloge si connu — déjà précité — du Livre de
la Sagesse « consommée en peu de temps, elle a fourni une longue carrière ».
Inhumée au cimetière de Lisieux, avec les honneurs convenables, elle commença
aussitôt à être célèbre dans l'univers entier et son sépulcre devint glorieux.
La
promesse qu'elle avait formulée avant de mourir de «faire tomber sur la terre
une pluie de roses» — c'est-à-dire de grâces, — à peine montée au Ciel, elle la
réalisa à la lettre par d'innombrables miracles, et elle la réalise encore de
nos jours. Cette insigne Servante de Dieu qui, durant sa vie, s'était acquis la
sympathie de tous ceux qui l'approchaient, a vu, depuis sa mort, ce sentiment
prendre une force et une extension prodigieuses.
Emus
d'un tel renom de sainteté, un grand nombre de Cardinaux de la Sainte Eglise
Romaine, des Patriarches, Archevêques et Evêques, de France en particulier,
beaucoup aussi de Vicaires Apostoliques, de Supérieurs de Congrégations,
d'Abbés de Monastères et de Supérieures de Religieuses, adressèrent à Notre
Prédécesseur, Pie X, de sainte mémoire, des Lettres postulatoires pour obtenir
l'Introduction de la Cause de la Sœur Thérèse de l'Enfant-Jésus, les
accompagnant de beaucoup d'instances et de témoignages.
Ce
Pontife les accueillit très favorablement, et, le neuf juin de l'an mil neuf
cent quatorze, il signa, de sa propre main, la Commission de l'Introduction de
la Cause, confiée au très diligent Postulateur général de l'Ordre des Carmes
Déchaussés, le R.P. Rodrigue de Saint-François de Paule.
Toutes
les phases du Procès ayant été parcourues selon les règles, et la question de
l'Héroïcité des Vertus examinée, la Congrégation Générale se tint, le deux août
mil neuf cent vingt et un, en présence du Pape Benoît XV, Notre Prédécesseur,
d'heureuse mémoire. Le très Eminent et très Révérend Cardinal Antoine Vico,
Ponent de la Cause, y proposa à la discussion le Doute suivant: «Est-il certain
que les Vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité envers Dieu et le
prochain, ainsi que les Vertus cardinales de Prudence, de Justice, de Force et
de Tempérance, et les Vertus annexes, ont été pratiquées à un degré héroïque
par la Servante de Dieu THERESE DE L'ENFANT-JESUS, dans le cas et pour l'effet
dont il s'agit?» Tous les Cardinaux de la Sainte
Eglise Romaine présents et les Pères Consulteurs, donnèrent chacun leur
sentiment. Le même Pontife, les ayant écoutés avec bienveillance, réserva
cependant son suprême jugement, voulant d'abord implorer de Dieu une plus
grande lumière dans une chose de tant d'importance.
La
veille de la Fête de l'Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie, Notre
Prédécesseur manifesta enfin sa décision et prononça solennellement:
«Il
est certain que les Vertus théologales de Foi, d'Espérance et de Charité,
envers Dieu et le prochain, ainsi que les Vertus cardinales de Prudence, de
Justice, de Force et de Tempérance et les Vertus annexes, ont été pratiquées
par la Vénérable Servante de Dieu, THERESE DE L'ENFANT-JESUS et A UN DEGRE
HEROÏQUE»
II
ordonna d'en publier le Décret, de l'insérer parmi les Actes de la Sacrée
Congrégation des Rites sous la date du quatorze août mil neuf cent vingt et un.
Cette
Cause avait une marche si rapide et si heureuse, accompagnée de tant
d'allégresse, que deux miracles furent aussitôt proposés à l'examen, choisis
entre une multitude de divers prodiges que l'on disait avoir été obtenus dans
tout l'Univers chrétien, par l'intercession puissante de la Vénérable Thérèse.
Le premier concerne la Sœur Louise de Saint-Germain, de la Congrégation des
Filles de la Croix, souffrant d'une maladie organique, à savoir: d'une lésion
anatomique et pathologique, c'est-à-dire d'un ulcère très grave de l'estomac,
de forme hémorragique. Après avoir imploré l'intercession auprès de Dieu de la
Vénérable Thérèse de l'Enfant-Jésus, la malade recouvra une parfaite santé,
comme trois éminents médecins le reconnurent unanimement, ayant chacun donné
son sentiment, par écrit, à la demande de la Sacrée Congrégation des Rites. Le
second miracle, assez semblable au premier, est la guérison du jeune
séminariste, Charles Anne, malade de tuberculose pulmonaire hémoptysique en
période cavitaire. Il invoqua avec confiance l'aide de la Servante de Dieu et
guérit parfaitement, comme cela résulte avec évidence des conclusions de trois
médecins et de la série d'arguments sur lesquels se basait leur décision.
Aussi tous ceux qui
étaient appelés à donner leur sentiment furent en mesure, après avoir mûrement
pesé toutes choses, de formuler un jugement certain et indubitable sur la
question soumise à l'examen. Après donc les deux Congrégations
Anté-préparatoire et Préparatoire, vint la Congrégation Générale, le trente
janvier mil neuf cent vingt-trois, dans laquelle fut discuté, en Notre
présence, le Doute suivant : «Y a-t-il certitude de miracles, et de quels
miracles, dans le cas et pour l'effet dont il s'agit?» Les Cardinaux de la
Sainte Eglise Romaine présents, et les Pères Consulteurs exposèrent, chacun à
leur tour, leur manière de voir. Après les avoir écoutés avec attention, Nous
avons cru pouvoir suspendre Notre décision, suivant l'usage, pour obtenir, en une
chose si grave, un secours plus abondant du Père des Lumières.
Enfin,
le dimanche de la Quinquagésime, fête de l'Apparition de l'Immaculée Vierge
Marie, à Lourdes, et veille du premier anniversaire de Notre couronnement, Nous
avons voulu, en ce jour doublement heureux, manifester Notre décision; et, en
présence de l'Eminentissime Cardinal Antoine Vico, Evêque de Porto et de
Sainte-Rufine, Préfet de la Sacrée Congrégation des Rites et Ponent de la
Cause, ainsi que des autres dignitaires de cette Congrégation, Nous avons
déclaré solennellement: «II y a certitude de miracle dans les deux cas
proposés, à savoir: la guérison instantanée et parfaite de la Sœur Louise de
Saint-Germain, de la Congrégation des Filles de la Croix, d'un très grave
ulcère de l'estomac, de forme hémorragique, et la guérison instantanée et
parfaite du séminariste Charles Anne, d'une tuberculose pulmonaire hémoptysique
en période cavitaire» Et Nous avons donné ordre d'en publier le Décret et de
l'insérer dans les Actes de la Sacrée Congrégation, le onze février de l'an mil
neuf cent vingt-trois.
Peu
de temps après, c'est-à-dire le six mars de la même année, dans une réunion
générale de la même Congrégation, le même Cardinal-Ponent de la Cause proposa,
en Notre présence, la question suivante: «Etant donné la reconnaissance des
Vertus et des deux miracles, peut-on, en toute sûreté, procéder à la solennelle
Béatification de la Vénérable Servante de Dieu, Sœur THERESE DE
L'ENFANT-JESUS?» Tous les assistants répondirent
d'une même voix: «ON LE PEUT EN TOUTE SÛRETÉ»
Pour prononcer
cependant Notre jugement définitif, Nous avons choisi le jour heureux de la
Fête du Saint Patriarche Joseph, illustre Epoux de la Bienheureuse Vierge Marie
et Patron de l'Eglise universelle, et Nous avons solennellement déclaré:
«On peut, en toute
sûreté, procéder à la Béatification de la Vénérable Servante de Dieu, Sœur
THERESE DE L'ENFANT-JESUS» Et Nous avons ordonné d'en publier le Décret et de
l'insérer dans les Actes de la Sacrée Congrégation des Rites, à la date du
dix-neuf mars mil neuf cent vingt-trois, et d'expédier des Lettres
apostoliques, en forme de Bref, pour la célébration des cérémonies de la
Béatification dans la Basilique Vaticane.
Ces Solennités de la
Béatification furent célébrées dans la Basilique Patriarcale de Saint-Pierre,
Prince des Apôtres, le vingt-neuf avril suivant, avec un grand concours de
clergé et de peuple et dans l'effusion de la joie universelle.
Sur le récit de
nouveaux prodiges de la Bienheureuse Thérèse de l'Enfant-Jésus, Nous avons
ordonné à Sa Sacrée Congrégation des Rites, le vingt-cinq juillet de l'an mil
neuf cent vingt-trois, de reprendre la Cause de cette même Bienheureuse. Deux
miracles ayant été proposés à son examen, les Procès instruits et les témoins
entendus, la Sacrée Congrégation rendit ce Décret: «On est assuré de la
validité des procès accomplis, par l'autorité apostolique, dans les diocèses de
Parme et de Malines, au sujet de miracles attribués à F intercession de la
BIENHEUREUSE THERESE qui avait été sollicitée, dans le cas et pour l'effet dont
il s'agit» Ce Décret a été ratifié et confirmé par Nous, le onze juin de l'an
mil neuf cent vingt-quatre.
Les
deux miracles proposés à la discussion étaient les suivants: Le premier est la
guérison de Gabrielle Trimusi, le deuxième, la guérison de Maria Pellemans.
Gabrielle,
entrée à vingt-trois ans dans la Congrégation des «Pauvres Filles des
Sacrés-Cœurs», dont la Maison-Mère est dans la ville de Parme, commença à
souffrir du genou gauche en mil neuf cent treize. Employée aux travaux
domestiques, elle avait coutume do briser sur son genou, à la force de son
bras, le bois à brûler. La répétition de cet
acte finit par produire, sans qu'elle s'en aperçût, une lésion à la jointure,
qui dégénéra en affection tuberculeuse. Elle n'éprouva d'abord qu'une sensation
de douleur sourde, puis vinrent un tremblement du genou, la perte de l'appétit
et l'amaigrissement de la malade. Deux médecins appelés visitèrent la Sœur et
ordonnèrent des remèdes, mais sans aucun succès, si bien qu'au bout de trois
ans, elle fut envoyée à Milan où l'on employa l'héliothérapie, les bains, les
vésicatoires, les injections et autres choses semblables, sans aucun résultat;
au contraire, au bout de quatre ans, l'épine dorsale était atteinte à son tour.
La Sœur Gabrielle revint à Parme où plusieurs médecins qui la visitèrent
reconnurent une lésion de nature tuberculeuse, et ordonnèrent des remèdes
généraux. Le
médecin ordinaire de la Communauté, constatant que l'état de l'épine dorsale
allait aussi en empirant, conseilla de conduire la malade à l'hôpital. En
attendant, il effectua l'examen radioscopique du genou malade et constata une
périostite du sommet du tibia. Reçue à l'hôpital, elle fut de nouveau soumise à
l'application des rayons X. Pendant ce séjour à l'hôpital de Milan, atteinte de
la grippe, dite espagnole, elle éprouva dans la partie dorsale de la colonne
vertébrale de nouvelles douleurs qui allèrent toujours en augmentant.
Comme
tous les remèdes restaient inutiles, un ecclésiastique qui la visitait conseilla,
le treize juin mil neuf cent vingt-trois, de faire une neuvaine en l'honneur de
la Bienheureuse Thérèse de l'Enfant-Jésus, devant une petite image où était
aussi imprimée une prière à la Bienheureuse. La malade s'y unit, plus
préoccupée de la santé des autres sœurs que de la sienne propre. Comme le
dernier jour de cette neuvaine coïncidait avec la clôture d'un Triduum
solennel, célébré en l'honneur de la Bienheureuse dans l'Eglise des Carmes,
toute proche du Couvent, quelques-unes des Sœurs, et la malade elle-même,
demandèrent la permission d'y aller. Au retour, après avoir parcouru cette
courte distance d'un pas lent et très douloureux, la Sœur Trimusi entra dans la
Chapelle de la Communauté où les autres sœurs étaient réunies, comme de
coutume. La Supérieure exhorta la malade à prier avec confiance, et lui
enjoignit de regagner sa place. Chose merveilleuse! L’infirme, inconsciemment,
se mit à genoux sans ressentir aucune douleur et, sans plus de difficulté que
s'il avait été parfaitement sain, resta ainsi, reposant sur son genou malade,
et ne s'apercevant pas de cette merveille, parce que son attention était
absorbée par les douleurs dorsales qui, à ce moment, la tourmentaient plus
cruellement. Elle alla au réfectoire avec les Sœurs. Le repas fini, elle monte
l'escalier avec lenteur, entre dans la première chambre qu'elle rencontre,
enlève son appareil et crie à haute voix: «Je suis guérie! Je suis guérie!»
Aussitôt, elle reprit les emplois et les travaux de sa condition et les
exercices de la vie religieuse, sans aucune souffrance, ni fatigue, rendant
grâce à Dieu du miracle opéré par l'intercession de la Bienheureuse Thérèse de
l'Enfant-Jésus.
Les
médecins, désignés par la Sacrée Congrégation, discutèrent longuement cette
guérison, et statuèrent que la lésion du genou était une arthrosynovite
chronique, et celle de l'épine dorsale, une spondylite également chronique. Ces
deux lésions organiques, rebelles à tous les remèdes, ont cédé à la
Toute-Puissance de Dieu, et Sœur Gabrielle a recouvré par miracle la santé, et
y a persévéré. L'histoire du second miracle, telle que l'a racontée Maria
Pellemans qui en fut favorisée, est plus courte. Au mois d'octobre mil neuf
cent neuf, elle était malade d'une tuberculose pulmonaire bien constatée; puis
se déclarèrent une entérite et une gastrite, également de nature tuberculeuse. Elle reçut les soins des médecins, d'abord chez elle, puis dans un
sanatorium appelé «La Hulpe». Revenue à sa maison, elle entreprit, au mois
d'août mil neuf cent vingt, un pèlerinage au sanctuaire de Lourdes, dans
l'espoir d'obtenir sa guérison, mais ce fut sans succès. Au mois de mars mil
neuf cent vingt-trois, elle se joignit à un groupe de pèlerins qui visitaient
le Carmel de Lisieux, et, sur le tombeau de la Bienheureuse Thérèse de l'Enfant-Jésus,
ayant invoqué avec confiance son intercession, elle recouvra aussitôt une
parfaite santé.
Trois médecins,
convoqués d'office par la Sacrée Congrégation des Rites pour donner leur avis
sur ces deux miracles, exprimèrent tous, et par écrit, une réponse favorable.
Dans ces guérisons,
la vérité du miracle apparut hors de doute, elle brilla même avec une splendeur
inaccoutumée, à cause des particularités dont ces prodiges étaient entourés.
C'est pourquoi ceux qui ont été appelés à donner leur suffrage ont pu le faire,
en s'appuyant sur l'autorité qui résulte de l'accord unanime des hommes de
l'art ; dans la Congrégation Générale, tenue, en Notre présence, le dix-sept
mars de l'année courante, et au cours de laquelle Notre cher Fils Antoine Vico,
Cardinal de la Sainte Eglise Romaine, Ponent de la Cause, proposa le Doute
suivant: «Y a-t-il certitude de miracle, et de quels miracles, dans le cas et
pour l'effet dont il s'agit?» Les Révérendissimes Pères Cardinaux de la Sainte
Eglise Romaine, les Prélats et les Pères Consulteurs exprimèrent leur avis,
chacun à son tour. Après les avoir entendus, dans la joie de Notre âme, Nous
avons cependant sursis à faire connaître Notre pensée, voulant implorer encore,
par d'instantes prières, pour une décision si importante, un secours plus
puissant et plus efficace du Père des Lumières.
Peu après, cependant,
Nous avons choisi et fixé le dix-neuvième jour de mars, auquel l'Eglise se
réjouit en la Fête du saint Patriarche Joseph, Epoux de la Bienheureuse Vierge
Marie et Patron de l'Eglise universelle, et, en présence du Cardinal Préfet de
la Sacrée Congrégation des Rites et des principaux dignitaires, Nous avons
prononcé solennellement: «Il y a certitude de miracle dans les deux cas
proposés».
Puis, le
vingt-neuvième jour du même mois, après avoir recueilli les suffrages unanimes
des Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine et des Pères Consulteurs, Nous avons
solennellement déclaré: «ON PEUT EN TOUTE SÛRETÉ PROCÉDER A LA CANONISATION
SOLENNELLE DE LA BIENHEUREUSE THERESE DE L'ENFANT-JESUS, Vierge, Moniale
Professe de l'Ordre des Carmélites Déchaussées, du Monastère de Lisieux» Après
tous ces préliminaires et ces Décrets, afin d'observer jusqu'au bout toutes les
sages prescriptions de Nos Prédécesseurs en vue de la célébration et de l'éclat
d'une si auguste Cérémonie, Nous avons d'abord convoqué Nos chers Fils, les
Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, à un Consistoire secret, le trente du
mois de mars, pour leur demander leur avis. Dans ce Consistoire, Notre
Vénérable Frère Antoine Vico, Cardinal de la Sainte Eglise Romaine, Evêque de
Porto et de Sainte-Rufine, et Préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, Nous
exposa éloquemment, à Nous, et aux Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, la
vie et les miracles de la Bienheureuse Thérèse de l'Enfant-Jésus et des autres
nouveaux Saints, et demanda avec beaucoup d'ardeur qu'elle fût élevée aux
suprêmes honneurs. Ce discours achevé, Nous avons recueilli les suffrages des
Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine sur celte question: «Faut-il en venir à
la Canonisation solennelle de cette Bienheureuse?» et chacun des Cardinaux
exprima son avis.
Puis, le second jour
d'avril, Nous avons tenu un Consistoire public dans lequel, après avoir entendu
avec plaisir un très savant discours sur la Bienheureuse Thérèse de
l'Enfant-Jésus, de Notre cher Fils Jean Guasco, avocat de Notre Cour
Consistoriale, tous les Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, d'une voix
unanime, Nous ont exhorté à la décision suprême de cette Cause. Nous avons pris
soin encore d'expédier des Lettres de la Sacrée Congrégation Consistoriale aux
Vénérables Evêques, non seulement aux plus voisins, mais même aux plus
éloignés, pour les aviser de cette solennité, afin, que, s'il leur était
possible, ils vinssent près de Nous, pour Nous donner aussi leur sentiment. Il en vint de divers
pays, et ils assistèrent, le vingt-deux du mois d'avril, à un Consistoire
semi-public, en Notre présence, après avoir pris connaissance de la Cause, par
un Résumé, qui fut* remis à chacun, tant de la vie, des vertus et des miracles
de la Bienheureuse Thérèse de l'Enfant-Jésus, que de tous les Actes faits en
Notre présence et dans la Sacrée Congrégation des Rites. Et, non seulement Nos
chers Fils, les Cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, mais aussi Nos
Vénérables Frères les Patriarches, Archevêques et Evêques, d'un accord unanime,
Nous ont pressé de célébrer cette Canonisation. De tous ces suffrages, Nos
chers Fils, les Protonotaires apostoliques, ont dressé les Actes pour être
conservés dans les Archives de la Sacrée Congrégation des Rites.
Nous
avons donc décidé de célébrer la solennité de cette Canonisation en ce jour,
dix-septième du mois de mai, en la Basilique Vaticane, et, en attendant, Nous
avons vivement exhorté les Fidèles du Christ à redoubler de ferventes prières,
spécialement dans les églises où le Très Saint Sacrement est exposé à
l'adoration; afin qu'eux-mêmes goûtent plus abondamment les fruits d'une si
grande solennité, et que le Saint-Esprit daigne Nous assister plus efficacement
dans un si grave exercice de Notre charge.
En
ce jour donc, si heureux et si désiré, les Ordres du Clergé Séculier et
Régulier, les Prélats et les Dignitaires de la Curie Romaine et tout ce que
Rome compte de Cardinaux, Patriarches, Archevêques, Evêques et Abbés, se
rassemblèrent dans la Basilique Vaticane magnifiquement ornée. En leur
présence, Nous fîmes Nous-même Notre entrée.
Alors
Notre Vénérable Frère Antoine Vico, Cardinal de la Sainte Eglise Romaine,
Evêque de Porto et de Sainte-Rufine, Préfet de la Sacrée Congrégation des Rites
et préposé à la poursuite de cette Cause de Canonisation, après un discours de
Notre cher Fils Virgile Jacoucci, Avocat de Notre Cour Consistoriale, Nous
présenta les vœux et les prières de l'Episcopat et de tout l'Ordre des Carmes
Déchaussés,
pour que Nous mettions au nombre des Saints la Bienheureuse Thérèse de
l'Enfant-Jésus que Nous avons déjà déclarée Patronne des Missions et des
Noviciats de l'Ordre du Carmel.
Le même Cardinal et
le même Avocat renouvelèrent une seconde et une troisième fois leur demande
avec une plus grande et suprême instance. Nous, alors, ayant imploré avec
ferveur la lumière céleste, «pour l'honneur de la Sainte et Indivisible
Trinité, pour l'accroissement et la gloire de la Foi Catholique, par l'autorité
de Notre-Seigneur Jésus-Christ, les Saints Apôtres Pierre et Paul et la Nôtre,
après mûre délibération et du suffrage de Nos Vénérables Frères les Cardinaux
de la Sainte Eglise Romaine, ainsi que les Patriarches, Archevêques et Evêques,
Nous avons déclaré que ladite BIENHEUREUSE THERESE DE L'ENFANT-JESUS, Moniale
Professe de l'Ordre des Carmélites Déchaussées, est SAINTE et doit être
inscrite au Catalogue des Saints».
Nous avons ordonné
que Sa mémoire de cette Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus soit célébrée chaque
année, le trois octobre, et notée au Martyrologe Romain.
Enfin, Nous avons
rendu au Dieu très Bon et très Grand de ferventes actions de grâces pour un si
grand bienfait, et Nous avons célébré solennellement le Saint Sacrifice, et
accordé très affectueusement une Indulgence plénière à tous les assistants: et,
pour perpétuelle mémoire, Nous avons ordonné de rédiger et publier les
présentes Lettres qui seront signées de Notre main et des Cardinaux de la
Sainte Eglise Romaine.
Fidèles
du Christ, l'Eglise vous présente aujourd'hui un nouveau et admirable Modèle de
Vertus que tous vous devez contempler sans cesse. Car le caractère propre de la
sainteté à laquelle Dieu appela Thérèse de l'Enfant-Jésus, consiste surtout en
ce qu'ayant entendu l'appel de Dieu, elle lui obéit avec la plus grande
promptitude et la plus entière fidélité. Sans que sa manière de vivre sortît de
l'ordinaire, elle suivit sa vocation et la consomma avec tant de ferveur, de
générosité et de constance qu'elle atteignit à l'Héroïcité des Vertus.
C'est
de notre temps, où les hommes recherchent avec tant de passion les biens
temporels, que vécut cette jeune Vierge, dans la pratique sereine et courageuse
des vertus, en vue de la vie éternelle et pour procurer la gloire de Dieu.
Puisse son exemple, confirmer dans l'exercice des Vertus, non seulement ceux
qui habitent les cloîtres, mais les fidèles qui vivent dans le monde, et les
conduire à une vie plus parfaite!
Implorons
tous, en nos nécessités présentes, la protection de Sainte Thérèse de
l'Enfant-Jésus, afin que, sur nous aussi, par Son intercession, descende une
Pluie de Rosés, c'est-à-dire les grâces dont nous avons besoin. De science
certaine, et dans toute la plénitude de Notre Autorité Apostolique, Nous
affirmons et confirmons tout ce qui précède, et de nouveau Nous le décrétons et
ordonnons, et Nous voulons que les copies de ces Lettres, même imprimées,
pourvu cependant qu'elles soient signées d'un notaire public et munies du sceau
d'un personnage constitué en dignité ecclésiastique, aient la même valeur que
si Nos Lettres originales elles-mêmes étaient produites ou montrées.
Que
personne donc n'ose attaquer ou contredire ces Lettres de Notre Décision,
Décret, Mandat ou Volonté; si quelqu'un avait la témérité de le tenter, qu'il
sache qu'il encourrait l'indignation du Dieu Tout-Puissant et de Ses Saints
Apôtres Pierre et Paul.
Donné
à Rome près Saint-Pierre, l'an du Seigneur mil neuf cent vingt-cinq, le
dix-septième jour du mois de mai, de Notre Pontificat l'an quatrième.
PIE XI
REFERÊNCIAS
AQUIVO
DO CARMELO DE LUSIEUX
http://www.archives-carmel-lisieux.fr/carmel/index.php/apres-1897/b%C3%A9atification-et-canonisation/la-bulle-de-canonisation
http://www.archives-carmel-lisieux.fr/carmel/index.php/apres-1897/b%C3%A9atification-et-canonisation/le-bref-de-b%C3%A9atification
Ut In Omnibus Glorificetur Dei (RB 57, 9)
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